Le conseil lecture du #Festivaldepolar Nuit blanche du Noir de #Mons pour retrouver celles qui auraient pu être
Les effacées (Bernard Minier)
Sur la plage de Padrón, en Galice, Lucia Guerrero se penche avec émotion sur le corps d’une jeune femme. Comme les trois précédentes, elle a été enlevée cinq jours plus tôt sur le chemin du travail. Comme les autres, elle est maquillée et entourée d’un rituel galicien sensé chasser el aire, l’air, le mal-être, la dépression. Mais Lucia et son adjoint Arias sentent qu’ils approchent le tueur de près.

C’est le moment que choisit Peña, le chef de Lucia à l’UCO, pour la rappeler à Madrid toutes affaires cessantes. Marta Millán, une des femmes les plus riches d’Espagne vient d’être assassinée. Lucia a bien du mal à accepter d’ abandonner les ouvrières galiciennes, les effacées, les invisibles, pour venir enquêter sur la jet set madrilène. Mais il y a cette inscription « Tuons les riches », taguée sur le mur du luxueux appartement de Marta. Et un tueur qui s’en prend aux riches, ça ne peut que créer de la sympathie. Madrid s’embrase. Les manifestations, les revendications, les exactions se multiplient. Il faut faire vite. D’autant que deux autres milliardaires sont « exécutés ». Lucia se retrouve écartelée: comment faire pour décrypter, en même temps, ces deux univers et ces deux tueurs?
Dans ce roman gigogne qui est probablement son texte le plus engagé, Minier porte un regard critique sur une société espagnole (occidentale?) totalement duelle. Femmes versus hommes, pauvres versus riches, effacés versus dans la lumière, ignorants versus « au fait »… Toutes les frustrations sont concentrées et génèrent un principe de revendication qui passe pour une idéologie. D’un côté survivre, de l’autre se sentir vivre. Même s’il faut en passer par ces performances dites artistiques où de la merde au sperme, de la violence à la torture, de la drogue au bondage, tout est bon pour avoir une justification intellectuelle des excès. Et de la mort. Même dans ses plus grands moments précédents, Minier a rarement été aussi loin dans sa dissection quasiment entomologique de l’être humain. C’est donc bien plus qu’un thriller qu’il nous livre ici. C’est une secousse de conscience. (CD
Les effacées. Bernard Minier. XO éditions , 2024.
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