Après deux semaines de repos, le festival Nuit blanche du Noir revient avec ses conseils lecture et vous propose une fin de semaine pour découvrir la Bretagne avec …
Armorican psycho (Gwenael Le Guellec)
D’abord le titre et son jeu de mots attirent votre attention, parmi tous ces polars en pile, sortis pour vous procurer des frissons d’été. Ensuite, vous avez un double recul. La brique fait presque 800 pages et il s’agit d’un premier roman. Méfiance. Mais en fin de compte, le fait qu’il ait obtenu le Grand prix du suspense présidé par Bernard Minier, ça titille vos noirs neurones. Et près tout, on peut toujours abandonner la lecture en cours de route. Il ne vous en coûtera qu’un dizaine d’euros pour la version poche.
Alors là, préparez-vous au choc : soit vous êtes déjà en vacances et vos prochaines journées vont être absorbées par la lecture, soit vous travaillez encore et vos nuits vont être très courtes. Parce que si vous ouvrez Armorican psycho, vous ne pourrez plus le lâcher. Comme une addiction, vous allez vouloir absolument accompagner dans ses déambulations brestoise, Yoran Rosko, l’étrange photographe qui ne sort que la nuit en raison d’une pathologie visuelle (l’achromatopsie) à cause de laquelle il craint la lumière et ne peut voir le monde qu’en noir, blanc et gris.

Armé de son appareil reflex Hasselblad, il parcourt les endroits les plus glauques, si possible par gros temps. Mais ce matin là, le lieutenant Le Bris vient lui annoncer la disparition de son mentor, Claude Garrec, chez qui on vient de trouver le cadavre d’un marin norvégien censé avoir péri en mer en 1995! Là, on est à la page 20! Il vous reste 780 pages pour suivre Yoran dans sa quête afin de retrouver son ami. Il lui faudra parcourir Brest dans tous les sens pour accumuler les indices, se décider à prendre la mer dans un chalutier en route pour Oslo où il va en déranger plus d’un par sa quête et ses questions, avant de poursuivre son périple en Islande pour revenir, enfin, conclure l’affaire à Brest. Et ce qu’il va découvrir est terrible. Car les morts s’enchaînent, victimes de celui qu’on appelle désormais Le Tailleur de sel. Les cadavres portent un chiffre romain anciennement tatoué sur le corps mais soigneusement éffacé. S’agit-il d’une secte, d’un club, d’un clan? Quels forfaits ont-ils commis? Ont-ils tué? Quel rôle Claude a-t-il joué?
Coup de maître que ce premier roman. Car Gwenael Le Guellec ne fait pas seulement vivre une intrigue à vous hérisser les poils et vous couper le souffle. Il donne aussi à voir. Les paysages, la réalité, les ambiances. Coincer son héros dans un univers en noir et blanc, ça aussi c’est une vraie bonne idée. Et ce Yoran a le don de générer l’empathie, ce qui n’est pas si fréquent dans les polars d’aujourd’hui. On souffre avec lui, on avale de la vodka glacée avec lui, on a le mal de mer avec lui, quand il encaisse des coups dans les rues d’Oslo on a mal avec lui et, avec lui, on pose le front sur la vitre et l’on observe les mouvements de la rade brestoise sous la tempête. Bref, pour paraphraser Bernard Minier qui sait de quoi il parle, voilà « une putain de sacré bonne histoire »! (CD)
Armorican psycho. Gwenael le Guellec. Les nouveaux auteurs 2019 et Pocket 2021.
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Une réflexion sur “Le conseil polar du vendredi soir”