Le conseil lecture du Festival Nuit blanche du Noir pour une fin de semaine à pister les…
Marchands de mort subite (Max Izambard)

Pierre Marlot a été journaliste. Aujourd’hui, à la retraite, il vit assez retiré dans la baie de Somme où il peut se livrer à l’observation des oiseaux. Dans ses jumelles, c’est une colonie d’avocettes qu’il regarde lorsque son téléphone sonne. Le consul de France en Ouganda l’appelle pour lui annoncer que, depuis plusieurs jours, on est sans nouvelles de sa fille, Anne, partie dans l’Est de la République du Congo dans le cadre d’un reportage. Car Anne, comme son père, est journaliste. Pierre n’hésite pas un instant et part à Kampala où il se rend rapidement compte qu’il ne doit attendre de l’aide de personne, pas même du consulat. Il se met alors à enquêter, seul, et très vite il comprend qu’Anne écrivait un article explosif sur les minerais du sang, particulièrement dérangeant pour la maffia internationale qui gère le juteux trafic de l’or au départ de l’Ouganda. Probablement est-ce la cause de l’enlèvement (?) le meurtre (?) la « simple » disparition de sa fille (?). A quoi s’ajoute le fait que l’éthique d’indépendance et d’intransigeance d’Anne autant que son mode de vie en dérangent plus d’un. Dans un pays où la vie d’un journaliste n’a aucune valeur et où les arrestations ne se comptent plus. Dans un pays pris dans la tourmente d’une insurrection étudiante. Dans un pays où un dictateur vieillissant tente vaille que vaille de maintenir une sorte d’équilibre avant que les chacals ne lui succèdent.
Pour ce premier roman, passionnant de bout en bout, Max Izambard transforme l’Ouganda en un véritable objet littéraire noir : pouvoir, violence, luttes d’influences, répression, sexe, corruption, tout y est. Et, bien entendu, tout y est au service du seul profit de quelques-uns. L’intrigue efficace et l’écriture très aboutie confèrent à ce texte, au demeurant fortement documenté, un dynamisme que l’on verrait bien transcrit pour le cinéma. Ajoutez à cela des personnages très construits, une vision du métier de journaliste qui force notre empathie, et une fin somme toute assez peu manichéenne malgré le regard désabusé sur la capacité de justice du monde d’aujourd’hui. Prenant. (CD)
Max Izambard sera au Festival Nuit blanche du Noir le 10 novembre 2021.
Marchands de mort subite. Max Izambard. Rouergue Noir, 2021.